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« Grâce à Poutine, la Crimée a disparu »
Article de Julian Röpcke, édition allemande du Bild
Hier, la Crimée a disparu de la carte de la Russie – du moins comme « arrondissement fédéral » de la Fédération de Russie. Ce pas peut entraîner des conséquences importantes, surtout dans le contexte des sanctions européennes contre la Russie.
Déjà deux ans ont passé depuis l’annexion de la Crimée. Aujourd’hui, le Kremlin essaie d’intégrer la péninsule plus profondément dans la structure de la Russie. Le président Vladimir Poutine (63 ans) a signé un décret plaçant la Crimée, qui, selon le droit international, appartient à l’Ukraine, sous la juridiction de l’Arrondissement Fédéral Méridional, a écrit l’agence d’informations TASS jeudi soir. Dans un message de l’agence il est dit que ce pas vise à « renforcer l’efficacité opérationnelle des structures étatiques fédérales ».
Les personnalités politiques les plus importantes de Crimée ont été envoyées dans d’autres arrondissements de ce pays immense. Sergey Menyailo, gouverneur de Sébastopol, est maintenant en lointaine Sibérie, tandis que son collègue de l’Arrondissement Fédéral de Crimée, Oleg Belyaitsev, a été envoyé dans le Caucase.
« Poutine veut annuler les sanctions »
Mais pourquoi la Russie fait-elle justement cela maintenant ? Un « insider » des cercles diplomatiques a confié à Bild qu’il s’agissait probablement d’une tentative de Poutine d’échapper aux sanctions imposées en réponse à l’annexion de la Crimée et, de cette manière, de contourner les sanctions occidentales.
- « Par exemple : les consulats allemands ne peuvent pas délivrer de visas aux habitants de Crimée occupée qui ont obtenu un passeport russe. Cela pourra désormais changer car ils seront de facto sous la juridiction de l’Arrondissement Fédéral Méridional », explique le diplomate.
- De la même façon, on peut alléger où complètement échapper aux sanctions sur l’importation des produits originaires de Crimée occupée. Jusqu’à présent, il est interdit d’importer vins et champagnes de Crimée dans l’UE et aux États-Unis. « Maintenant, on peut simplement remplacer les étiquettes et écrire que la production est d’origine de l’Arrondissement Fédéral Méridional. Ainsi les institutions internationales ne verront aucune différence avec la production sanctionnée et interdite », raconte l’insider qui a souhaité rester anonyme.
- Ensuite, cette ruse peut aider Poutine à trouver une solution à la crise énergétique. Aujourd’hui, il est interdit aux grands groupes européens de fournir des turbines à gaz à la Crimée. « Maintenant, on peut les livrer à Krasnodar comme production pour l’Arrondissement Fédéral Méridional. Et ensuite c’est aux Russes de décider de ce qu’ils veulent en faire, c’est leur droit, et personne n’aura violé les sanctions ».
La Russie voulait cacher cette décision
La Russie a fait tout son possible pour laisser ce pas dans l’ombre :
Elle a bloqué le message du Conseil de sécurité de l’ONU, publié pour la presse à New York. Cela a été fait 15 minutes avant la fin de la période durant laquelle ces messages peuvent être bloqués (à 22h45 heure allemande).
La décision du Conseil de sécurité de l’ONU, mentionnée ci-dessus, appelle à respecter « l’intégrité territoriale de l’Ukraine » et « la souveraineté complète » du pays, elle exprime de « sérieuses préoccupations » sur la décision de Poutine de placer la Crimée sous la juridiction de l’Arrondissement Fédéral Méridional.
Trump pourrait lui aussi négliger le droit international
Entre temps, Donald Trump, candidat du Parti républicain pour la présidentielle, a déclaré que s’il devenait président, il reconnaîtrait la Crimée comme faisant partie de la Russie et envisagerait la possibilité de lever les sanctions contre la Russie.
« Trump n’est pas encore président des États-Unis », a souligné Volodymyr Yeltchenko, ambassadeur d’Ukraine à l’ONU. Yeltchenko a appelé le gouvernement américain et le futur président des États-Unis à respecter les décisions antérieures du Conseil de sécurité de l’ONU sur la Crimée.