Les rélations entre l’Ukraine et la Russie : la stratègie de confinement

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L’Institut de la politique internationale a réalisé une étude sur les relations entre l’Ukraine et la Russie et a présenté ses résultats à l’UCMC. Les experts estiment que l’Ukraine doit miser sur une stratégie de confinement prévoyant des réformes, la croissance économique et le renforcement de sa capacité de défense, ainsi que prendre une position plus active sur la scène internationale pour mobiliser la communauté internationale en sa faveur.

La Russie et ses prétentions au rôle de leader dans la région

Les résultats de cette recherche prouvent que la raison principale de la situation actuelle est la prétention séculaire de la Russie au rôle de leader dans la région et la perception de l’Ukraine comme un satellite intégré. En conséquence, les tentatives de l’Ukraine de choisir son propre vecteur de développement provoquent toujours une réaction dure de la Russie. Une autre raison du conflit actuel est le changement de stratégie politique de la Russie, qui a démarré après les évènements sur la Place Bolotna et son basculement d’une posture pro-occidentale vers la «guerre froide» avec le début du troisième mandat présidentiel de Vladimir Poutine.

Quelles relations après la crise?

Aujourd’hui, il est évident que le vecteur du développement de l’Ukraine est diamétralement opposé à celui de la Russie. Dans cette situation, il est important pour l’Ukraine d’analyser attentivement les processus en Russie et d’essayer de prévoir son comportement y compris à long terme, ainsi que l’influence de ces processus sur l’Ukraine.

Il vaut mieux déjà réfléchir aux relations entre l’Ukraine et la Russie après la fin du conflit. Les experts estiment qu’il faut exiger de la Russie qu’elle abandonne ses ambitions impériales et ses créances sur la domination régionale ou mondiale,  qu’elle respecte la base contractuelle et cesser d’utiliser les sujets de la langue et de la culture comme une occasion de déstabilisation et de chantage.

la stratégie de confinement : rompre les relations diplomatiques et introduire un régime sans visas

En ce qui concerne la meilleure solution pour l’Ukraine, les avis des experts sont partagés. Selon Volodymyr Ogrysko, directeur du Centre des études sur la Russie, ministre des Affaires Étrangères d’Ukraine en 2007-2009, l’Ukraine devrait «rompre les relations diplomatiques avec le pays-agresseur, introduire un régime de visas et enfin abandonner la Communauté des États indépendants (CEI) et surtout ne pas espérer que la situation changera prochainement». Il insiste aussi sur le fait que l’Ukraine ne doit pas uniquement réagir aux actions de son voisin, mais mener son propre jeu politique de confinement de la Russie , parallèlement au renforcement de sa capacité de défense. «Dans ce cas, l’Ukraine deviendra intéressante pour l’OTAN en proposant à l’Alliance ce qu’elle n’a pas encore : une aile forte à l’est».

L’alternative : mener une stratégie prudente et garder les contacts

Selon Konstyantyne Grychtchenko, ministre des Affaires Étrangères d’Ukraine en 2010-2013, il faudrait plutôt opter pour une stratégie plus prudente. «Aujourd’hui, notre objectif principal est de trouver une formule pour arrêter ce conflit armé, ce qui correspondrait à nos intérêts à long terme. Et cela est impossible sans l’aide de la Russie. Il est difficile justement de proposer une formule qui arrangerait tout le monde, mais nous devons comprendre qu’il est très important de régler ce problème afin de pouvoir avancer sur le chemin des réformes et la construction d’une société démocratique».  Selon l’expert, il reste important de garder des relations avec le gouvernement russe afin de pouvoir tenter de l’influencer.

La politique intérieure de la Russie comme une clé pour résoudre les problèmes extérieure

Volodymyr Fedorine, ancien rédacteur en chef de Forbes Ukraine a aussi souligné que «la chose la plus importante que l’Ukraine peut faire pour entretenir des relations stables avec la Russie est de construire un État fort». Pour cela, il faut réaliser des réformes radicales et renforcer les capacités de défense. «L’Ukraine pourrait aussi devenir un leader dans la consolidation des travaux d’analyse sur les processus en Russie. Pour cela il faut juste comprendre la gestion des projets et des institutions pour que nos alliés occidentaux voient que l’Ukraine n’agit pas seulement dans ses propres intérêts, mais est aussi capable de produire des analyses de qualité».

Le travail actif avec les partenaires occidentaux

Les experts sont tous d’accord pour dire que l’Ukraine devrait prendre une position plus décisive et active au niveau international pour s’assurer du soutien de l’Occident et de la prolongation des sanctions. Ceci est très important vu le renforcement des sentiments pro-russes en Europe.

Quel avenir pour le Minsk?

Les avis des experts à propos des Accords de Minsk sont aussi partagés. Selon Volodymyr Ogrysko, il ne sert à rien d’espérer que les formats de Minsk ou de Normandie aideront à régler la situation, car les deux dernières années ont démontré l’incapacité des traités et des institutions internationales face à ces défis. Konstyantyne Grychtchenko estime que le format de Minsk pourrait tout de même aider à arrêter les affrontements et transférer le dialogue sur la mise en œuvre des accords en pratique et «rejeter ce qui menace notre avenir, mais en même temps, proposer des formules qui pourraient être utilisées avec la perspective de trouver une solution dans le cadre juridique de l’Ukraine ». Certains pensent qu’il faut réunir différents facteurs, à savoir : les négociations dans le format de Minsk, la pression économique, les réformes en Ukraine, le renforcement des capacités de sécuritaires pour pouvoir résister à la Russie.


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L’Ukraine a beaucoup d’atouts pour augmenter sa notoriété auprès de l’OTAN. «Aujourd’hui, les Ukrainiens parlent surtout de leurs attentes, car ils attachent toujours trop d’importance à la Déclaration de Bucarest de 2008, tandis que les réalités politiques ont beaucoup changé. Il faut plutôt se concentrer sur les progrès que l’Ukraine a fait», a déclaré Bruno Lete, expert du Fonds allemand de Marshall.