Le 15 août, après une longue période d’élaboration et de tests, le système de déclaration électronique des biens des fonctionnaires et des membres de leur famille a été mis en place. Cependant ce système, qui devrait rendre publics les biens non-déclarés des fonctionnaires, a été dénaturé et peut être manipulé par des corrompus.
Kiev, le 15 août 2016 – La veille de la mise en place du système de déclaration électronique, le Service d’État de liaison spéciale et de défense de l’information n’a pas la possibilité de collecter et de déposer les déclarations, car il ne peut pas émettre de certification. Et pourtant, ce système était un outil efficace de lutte contre la corruption, il s’agissait également du dernier obstacle à franchir avant la cessation du régime des visas pour l’Union Européenne et c’est une condition nécessaire pour obtenir l’aide financière du FMI ( 3 milliards de dollars) et de l’Union Européenne (1,2 milliard d’euros). Deux solutions sont possibles: le retardement du lancement (avec la violation des obligations, mais une mise en place complète) ou un lancement en mode test.
Cette deuxième solution comporte de sérieuses conséquences, car le système en mode test n’a aucune valeur juridique. Donc, un fonctionnaire pris avec des actifs non déclarés, pourrait se justifier en affirmant qu’il avait déclaré ses biens, mais que le système n’avait pas enregistré la déclaration. Donc il ne sera pas poursuivi en justice.
Le Service d’État de liaison spéciale et de défense de l’information ( ce Service est étroitement lié à Olexandre Tourtchynov soupçonné d’être la principale personne à bloquer la déclaration électronique) a déclaré que le système n’était pas prêt (alors que la première étape nécessaire pour la mise en place du système est terminée) : incapacité à certifier le système à court terme (alors que le Service a approuvé le planning), absence de tests indépendants ( 2 entreprises ont déjà effectué les tests), problème dans la protection des logiciels ( le service n’a pas effectué son analyse). Compte tenu de cette situation, la question est de savoir si le gouvernement ukrainien a vraiment intention de lancer ce système tellement important pour la société et les partenaires européens.
«L’assassinat des déclarations est un assassinat du régime sans visas et de l’aide financière de l’Occident. Sans cet argent, la hryvnia s’effondrera», a déclaré Vitaly Chabounine, directeur du «Centre de la prévention de la corruption, lors d’une conférence de presse à l’Ukraine Crisis Média Center. «Cela complique la prévention de la corruption en Ukraine et crée la possibilité de légaliser tous les revenus illégaux: l’argent de la corruption, le commerce des drogues, la contrebande etc. Les données non-certifiées ne sont pas des preuves, désormais on ne pourra plus mener d’enquête criminelle et les fonctionnaires pourront légaliser tout argent corrompu. L’été prochain, on se retrouvera dans la zone grise Financial Action Task Force. Les investisseurs ne viendont plus!», a expliqué Chabounine.
Yaroslav Yurtchychyn, chef de Transparency International d’Ukraine, a souligné que Petro Porochenko avait promis à la communauté internationale que le système de déclaration électronique sera entièrement lancé le 15 août 2016. «Je ne sais pas si le Président a honte, mais moi, j’ai vraiment honte. Car aujourd’hui, je dois dire à Transparency International que notre Président ne respecte pas sa parole. Les partenaires européens ont lié cela directement au régime de cessation des visas, le memorandum du FMI prévoit le système de déclaration électronique. Le peuple ukrainien est systématiquement berné, mais cela ne marchera pas avec la communauté internationale», a souligné Yaroslav Yurtchychyn. «L’État ukrainien n’a jamais donné d’argent pour ce système, il a été financé par le PROON et la Banque mondiale qui sont accusés désormais de vouloir mettre la pression sur l’Ukraine. Un autre «bouc émissaire» est l’entreprise privée «Miranda» qui a accepté de travailler 7 jours sur 7pour mettre au point des logiciels. Maintenant, on leur demande de faire des corrections, mais on refuse de préciser lesquelles».
«La déclaration électronique est un test décisif qui montre que le gouvernement n’a jamais eu l’intention de lutter contre la corruption. Cette violation de la loi et des obligations prises envers l’Union Européenne et le FMI prouve que le gouvernement ukrainien n’a pas l’intention de respecter cette loi », estime Olexandra Drik, chef de l’ONG «Comité civique de lustration».
Sergiy Letchtchenko, député ukrainien, déclare que le président ukrainien est directement responsable de ce sabotage. Son collègue Moustafa Nayem : «En ce moment, Petro Porochenko doit appeler les responsables de la mise en place du système de déclaration électronique et leur dire : nous l’avons promis, faisons-le. Mais au lieu de faire cela, il fait des discours à la télé et raconte des bobards. Si le président passe à la télé pour dire qu’il faut mettre en place le système de déclaration électronique, mais qu’un petit fonctionnaire l’empêche de le faire, alors c’est absurde».