REPORTAGE – A Kiev jeudi, l’ambassadeur de France a répondu aux contestataires venus demander l’annulation définitive de la vente des Mistral à la Russie. Le sénateur américain John Mc Cain a pour sa part salué le geste de François Hollande, l’exhortant à aller plus loin.
“Je salue la France d’avoir suspendu ses livraisons de Mistral à la Russie et j’espère que cette suspension se transformera en refus définitif”. Le sénateur John McCain ne fait pas dans la langue de bois. C’est la quatrième fois qu’il se rend à Kiev depuis les protestations sur la place Maïden, il y a un an. Encore une fois, il est venu soutenir la cause ukrainienne qui lui tient tant à coeur. Ou s’en prendre à Poutine. “Vladimir Poutine n’a qu’une obsession, restaurer le vieil empire russe”, martèle le sénateur de l’Arizona. “Après tout, jusqu’ici, il n’a payé qu’un tout petit prix. Certes, le rouble se dévalue mais sa cote de popularité est au sommet et surtout, il ne peut se permettre de s’offrir une Ukraine libre et prospère”.
Infatigable John McCain, qui ne se dérobe à aucune question. “Oui, il faut armer l’Ukraine, oui, il faut leur apporter notre soutien et notre technologie en terme de renseignements, oui il faut alourdir les sanctions contre Poutine. Et non, l’administration Obama n’est pas assez forte”. John McCain attend beaucoup du sommet de l’OTAN qui s’est ouvert jeudi au Pays-de-Galles. “L’appétit de Poutine est de plus en plus grand. Plus il mange et plus il a faim. Je supplie mon gouvernement et le monde de faire davantage afin de soutenir l’Ukraine. Ce que j’attends du sommet de l’OTAN, c’est davantage de sanctions contre la Russie et un accord qui puisse permettre la livraison d’armes. Sinon, les ténèbres qui ont envahi notre monde ne feront que s’épaissir.”
“Merci la France mais ce n’est pas suffisant”
Deux heures plus tôt, devant l’ambassade de France, une poignée de contestataires viennent gentiment signifier leur peur, leur colère et leur ressentiment. Certes, la vente des Mistral est suspendue, mais eux en veulent l’annulation pure et simple. “Merci la France mais ce n’est pas suffisant”, “Que la France n’abandonne pas ses principes moraux”, voilà ce que l’on peut lire sur les pancartes de ces quelques manifestants. Des enfants sont mis à contribution. Craies bleues, jaunes, roses et vertes. Très appliqués, une fillette joliment blonde et un petit garçon s’échinent à former de belles lettres sur le sol. Un bus avec à son bord une palanquée de policiers a été acheminé sur les lieux. Au cas où.
Anastasia Fomitchova, 21 ans, étudiante et présidente de l’Association des Étudiants ukrainiens en France est venue interpeller Paris. “Je rappelle à la France qu’elle a d’abord soutenu l’Ukraine. Il faut qu’elle continue en abandonnant cette idée de vendre des Mistral à la Russie”. La jeune fille n’est clairement pas une activiste professionnelle mais ne manque pas de cran. Elle et sa petite troupe franchissent le cordon de police qui mène à la porte principale de l’ambassade de France et Anastasia demande par l’interphone à parler à un représentant français.
La requête est acceptée. Cinq minutes plus tard, le premier conseiller de l’ambassade, Frédéric de Touchet, répond à la jeune Anastasia qui est ainsi propulsée porte-parole de la troupe. “Le Président Hollande l’a annoncé, les conditions ne sont pas réunies pour poursuivre la vente des Mistral”. Soucieux de ne pas froisser ses hôtes, le diplomate rappelle que “la solution ne peut être que politique, que la souveraineté de l’Ukraine passe avant tout et que la France est l’amie de ce pays”. Il se plie, en Ukrainien, aux interviews de la télé locale avant de disparaître derrière la lourde porte de l’ambassade, non sans avoir très obligeamment serré des mains. Et chacun rentre chez soi.
Le Journal du Dimanche
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