Lettre ouverte à Monsieur le Président du Parlement Européen

le 2 novembre 2016

Monsieur le Président du Parlement Européen,

C’est avec l’espoir que vous lirez cette lettre que je vous adresse au nom du peuple Ukrainien, au nom des citoyens européens, au nom des citoyens du monde civilisé, au nom des justes. C’est avec l’espoir que vous mettrez votre volonté, votre conscience d’être humain, votre pouvoir d’homme politique lucide et clairvoyant, pour que cesse l’injustice, pour que cesse le chaos.

Vous reconnaitrez aisément qu’il est intolérable qu’au 21ème siècle, on puisse kidnapper un homme libre dans un pays libre et souverain, le transférer, juger et condamner dans un autre pays où règne l’arbitraire, où les droits de l’homme sont quotidiennement bafoués au vu et au su du monde entier, et quelquefois officiellement reconnus comme étant nuls et non avenus, comme par le clergé dudit pays, par exemple.

Pourtant, c’est ce qui s’est passé à plusieurs reprises, depuis, et même un peu avant que la Russie, qui fait partie de manière incompréhensible pour le commun des mortels, du conseil de sécurité de l’ONU, et qui a gardé contrairement à l’Ukraine son arsenal nucléaire, alors qu’elle n’était comme l’Ukraine, qu’une des républiques qui composaient l’URSS, n’envahisse illégalement la Crimée territoire Ukrainien.

Des hommes libres, des hommes dignes, des hommes courageux, se sont levés pour tenter de défendre légitimement, leur terre, leur patrie, sur leur territoire, certains étant d’ailleurs des russes ethniques, mais tous des citoyens ukrainiens, des hommes de devoir, de justice, se battant contre le mal, la tyrannie. Ces braves ont été kidnappés, battus, emmenés contre leur gré en Russie. Après des procès iniques, dignes de l’époque stalinienne, ils ont été condamnés pour des motifs fallacieux, certains après des aveux obtenus sous la torture, le chantage, la menace contre leur famille, à de lourdes peines de camp de redressement.

A quoi sert la démocratie, à quoi sert l’Europe, à quoi sert le pouvoir dans le monde libre, civilisé, si on ne l’utilise pas pour faire éclater la justice, la vérité, pour défendre la liberté ? Suis-je naïf de croire encore à de telles valeurs, à cette mission de la démocratie, dites le moi, monsieur le président ? Je ne crois pas que seule la real et mercantile politique doive dicter nos décisions et même si cela était, ce dont je serai désolé, on ne peut pas dire que la Russie d’aujourd’hui soit un partenaire aussi indispensable qu’elle veuille nous le faire croire. Il est d’ailleurs tout aussi faux de penser que la Russie est puissante, elle n’est que brutale et ne reconnait que la force, ce que les dirigeants occidentaux ne semblent pas avoir compris.

Si je suis dans le vrai, si vous aussi vous croyez en votre mission, faites en sorte que l’Europe existe, qu’elle devienne encore plus forte, faites en sorte qu’elle ne meure pas, comme le voudrait certains dictateurs avides d’étendre leur emprise sur le monde civilisé.

Demandez à tous les députés européens d’agir pour obtenir la libération des otages ukrainiens prisonniers en Russie. Ne levez pas les sanctions, au contraire, les dictateurs ne respectant que le langage de la force, de la puissance, augmentez et prolongez ces sanctions, jusqu’à la libération de ces pauvres et magnifiques prisonniers, jusqu’au départ des forces du mal, de la Crimée, du Donbass, voire de la Syrie où des crimes de guerre sont commis chaque jour, jusqu’à ce que le peuple russe , abruti par la propagande d’état , prenne enfin conscience, ce qui semble être le cas depuis un certain temps, et qu’il puisse , avec l’aide de l’occident, décider du sort du dictateur assassin et de ses complices, soit en le jugeant lui-même, soit en l’envoyant devant un tribunal international, pour crimes contre l’humanité, crimes de guerre et crimes de droit commun.

Monsieur le président, je réitère ma supplique, notre supplique à tous, hommes libres et justes, pour que soient libérés les prisonniers Ukrainiens, détenus illégalement en Russie.

– Oleg SENTSOV, réalisateur, condamné à 20 ans de prison, pour avoir protesté contre l’annexion de la Crimée.

– Olexander KOLTCHENKO, étudiant, condamné à 10 ans de prison.

– Olexander KOSTENKO, dont la famille est actuellement persécutée, condamné à 3 ans et 6 mois de prison.

– Olexiy TCHYRNIY, professeur d’histoire, condamné à 7 ans de prison.

– Mykola KARPIUK, condamné à 22 ans de prison, et dont la famille n’a plus de nouvelles.

– Stanyslav – KLYCH, condamné à 20 ans de prison.

– Achtem TCHIYGOZ, adjoint du chef du Madjlis des Tatars de Crimée, condamné à 15 ans.

– Moustafa DEGERMEDJI, activiste tatar, condamné à 8 ans de prison.

– Ali ASANOV, activiste tatar, condamné à 8 ans de prison.

– Valentin VYGOVSKY, étrangement condamné pour espionnage pour le compte de l’Ukraine, alors qu’il était en Ukraine, son pays, à 11 ans de prison.

– Serhiy LYTVYNOV, un berger qui n’a jamais quitté son village, aux dires de tous les témoins, condamné pour crimes de guerre, à 8 ans et 6 mois de prison.

– Roman SOUCHTCHENKO, correspondant à Paris de l’agence de presse Ukrinform, arrêté le 30 septembre, en Russie et accusé stupidement d’espionnage.

Je tiens à préciser que tous ces hommes innocents et courageux, tous civils, ont été torturés physiquement et moralement, ont avoué sous l’emprise de drogues, ou devant les menaces contre leur famille, se sont ensuite rétractés devant leurs juges, mais n’ont jamais trahi ou impliqué leurs camarades, ce qui démontre leur droiture d’esprit et leur foi en la vérité.

Je pense que nous avons tous le devoir de faire en sorte que tous les prisonniers ukrainiens détenus en Russie, car la liste ci-dessus n’est malheureusement pas exhaustive, soient renvoyés en Ukraine, pour y être jugés s’ils y ont commis des crimes ou des délits, par des tribunaux Ukrainiens.

Par ailleurs les prisonniers militaires détenus en Russie ou dans les républiques fantoches du Donbass, doivent être également libérés, leur seul crime étant d’avoir défendu leur pays contre l’envahisseur.

Ne laissons pas la barbarie prospérer, ne laissons pas le peuple Russe retourner au moyen âge, aidons le à survivre, à vivre dignement, libre, et cela est possible en aidant la Syrie, l’Ukraine, en combattant le mal où qu’il soit sans se laisser impressionner par les rodomontades d’un roi nu.

Andrïy Myroslaw TANTCHAK, Ukrainien et citoyen Français.

photo: REUTERS