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A quoi s’attendre dans l’affaire Roman Souchtchenko?

Le 12 septembre, La Cour suprême de Russie a reconnu légalement le verdict du tribunal de la ville de Moscou concernant les 12 ans d’emprisonnement pour le journaliste ukrainien Roman Souchtchenko, illégalement détenu en Russie. La décision a été annoncée par un juge de la Cour suprême de la Fédération de Russie. Ainsi l’appel des avocats est rejeté en totalité. Souchtchenko a déjà déclaré qu’il n’était pas d’accord avec la décision du tribunal et qu’il continuerait à lutter pour sa libération, y compris en déposant une plainte auprès de la Cour européenne des droits de l’homme. Qui est Roman Souchtchenko, pourquoi a-t-il été arrêté et quelle suite pourrait avoir cette affaire, à lire dans l’article de l’UCMC.

Qui est Roman Souchtchenko? Roman Souchtchenko est un journaliste ukrainien. Depuis 2002, il travaille comme correspondant pour l’Agence nationale ukrainienne Ukrinform. Depuis 2010, Roman est l’envoyé spécial d’Ukrinform en France. Par les publications parues dans la presse, on sait qu’en plus de sa formation de journaliste, Roman Souchtchenko est diplômé de l’Académie des chars de combat du génie militaire. Avant d’entrer à Ukrinform, Souchtchenko a effectivement travaillé pendant un certain temps au ministère de la Défense de l’Ukraine. Selon les observateurs, ce fait de sa biographie aurait pu être à l’origine de son affaire pénale. Roman est marié, il a deux enfants: une fille Yulia et un fils Maxime. Sa famille vit en France.

Comment les événements se sont-ils déroulés? Les services spéciaux russes ont arrêté Roman Souchtchenko le 30 septembre 2016. Le journaliste s’était déjà rendu à Moscou auparavant pour voir son frère. Son avocat, Mark Feyguine, familiarisé avec les matériaux de l’affaire, a constaté que Roman Souchtchenko était surveillé depuis décembre 2015. Afin d’avoir un prétexte pour arrêter Souchtchenko, le FSB a procédé à une provocation contre le journaliste et effectivement l’a piégé.

«À Moscou, on a transmis à Roman un disque numérique pour qu’il l’apporte à Paris. Roman n’avait pas besoin de ce disque, car il était journaliste. C’est le FSB qui en avait besoin et ils sont très professionnels pour créer ce type de situations. Il existe très peu de Services de renseignements qui pourraient se comparer à cette organisation dans ce domaine», explique Feyguine.

Selon lui, Souchtchenko devait transmettre ce disque à Paris à un autre journaliste ukrainien.

De quoi est-il accusé? Le 3 octobre 2016, le FSB a déclaré que le journaliste ukrainien qui depuis six ans travaillait comme correspondant de l’agence d’information Ukrinform en France, serait un colonel du Service des renseignements militaires ukrainien et rassemblait des informations secrètes sur les activités militaires russes et celles de la Garde nationale russe.

La base des preuves. Les détails des charges et la base des preuves contre l’Ukrainien sont peu connus: 8 des 12 volumes de l’affaire sont classés secrets. C’est pourquoi il a été décidé que le procès qui a commencé fin mars 2018 à Moscou se déroulerait à huis clos.

Le procès et le verdict. Le 4 juin 2018, le journaliste d’Ukrinform Roman Souchtchenko a été condamné pour espionnage à 12 ans de prison dans une colonie de sécurité stricte en Russie. Le FSB a déclaré que le journaliste était membre du Service de renseignement du ministère de la Défense de l’Ukraine et, au moment de son arrestation, il avait recueilli des informations secrètes en Russie.

Les pressions sur l’avocat. Le 24 avril 2018 l’avocat de Souchtchenko, Mark Feyguine, qui a également défendu Nadia Savtchenko et d’autres Ukrainiens détenus dans les prisons russes, a été privé du statut d’avocat. Ainsi, Souchtchenko n’a plus eu d’avocat un mois avant le verdict. La raison officielle de la décision des autorités russes était que Feyguine avait utilisé des mots grossiers dans trois posts sur sa page Twitter en juillet 2017. Après la révocation de sa licence, Feyguine a déclaré qu’il se sentait responsable vis-à-vis de Sushchenko, et continuera à travailler sur l’affaire, mais avec une autre qualité.

Depuis sa prison, Roman Souchtchenko a envoyé à sa famille ses dessins réalisés avec du thé et des téguments d’oignon. «Pour ces peintures, papa a utilisé du papier, des stylos à bille, des crayons, du thé et des oignons», a écrit sa fille Yulia sur Facebook. Les images représentent la banlieue de la ville italienne de Parme et le phare d’Ar-Maine en Bretagne française. «Mon père les a faites dans les cachots de Lefortovo en août et décembre 2017», a-t-elle déclaré. Petro Porochenko, président ukrainien, a également remarqué les dessins de Souchtchenko. «Merci, Roman, de ne pas perdre votre force, malgré le désir du régime du Kremlin de briser votre volonté», a-t-il écrit sur sa page Facebook.

La réaction du ministère des Affaires étrangères de l’Ukraine. Le ministère des Affaires étrangères ukrainien a réagi à la décision de la Cour suprême de la Fédération de Russie de reconnaître le verdict de 12 ans d’emprisonnement pour Roman Souchtchenko, le journaliste ukrainien illégalement retenu à Moscou. Comme l’a noté le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Mariana Betsa, le ministère n’avait aucune illusion au sujet du «verdict» à l’égard de Souchtchenko.

La réaction du président Porochenko. Le président ukrainien, Petro Porochenko, a été indigné par la décision de la Cour suprême de Russie qui a condamné le journaliste ukrainien Roman Souchtchenko à une peine de 12 ans. Le chef de l’État ukrainien l’a déclaré le 12 septembre sur Facebook. «Dès le début, c’était une farce et l’absurdité des «tribunaux» concernant Roman est évidente pour l’ensemble du monde civilisé. La Russie continue de vivre en 1937, alors que nous poursuivons notre combat contre l’agression russe et notre lutte pour la libération des otages ukrainiens du Kremlin», a écrit Porochenko.

Un échange serait-il possible? Mark Feyguine a admis la possibilité pour Souchtchenko d’être échangé contre Kyryl Vychinsky, le rédacteur en chef de RIA Novosti Ukraine, arrêté en Ukraine. Selon Feyguine, la décision d’échanger Sushchenko contre Vychinsky «dépend pleinement de Moscou et non de Kyiv». Il a ajouté que la Russie est intéressée par le retour de Vychinsky. Ce dernier a été arrêté à Kyiv le 15 mai. Le Service de sécurité de l’Ukraine a immédiatement annoncé que le rédacteur en chef de RIA Novosti Ukraine est accusé de promouvoir l’annexion de la Crimée par la Russie et de soutenir les «organisations terroristes LNR/ DNR ». Lors d’une perquisition de la banque cellulaire du suspect, les agents du SBU ont trouvé 200 mille dollars, des contrats de travail avec l’agence Russie Today, une arme à feu et des munitions. En juin, lors d’une des audiences, Vychinsky s’est adressé publiquement au président russe Vladimir Poutine avec une demande de protection juridique et des mesures pour sa libération, et il a déclaré qu’il reniait la citoyenneté ukrainienne. Le journaliste possède la citoyenneté russe qu’il a reçue en 2015. Toutefois, le Service des migrations de l’Ukraine a déclaré que Vychinski ne pouvait abandonner la citoyenneté ukrainienne pendant qu’il était soumis à une enquête.

 

La demande de grâce. Selon les dernières informations, Roman Souchtchenko serait prêt à rédiger un recours en grâce. C’est Marc Feyguine qui a confirmé cette information en direct sur la chaîne «Pryamiy».

 «Roman est prêt à écrire ce pauvre papier pour demander d’être gracié. Je ne vois pas de problème, et Roman est d’accord avec moi, parce que peu importe ce que vous écrivez, le principal est de repartir pour Kyiv». Dans le même temps, le défenseur a souligné que Souchtchenko ne plaidait toujours pas coupable et que la demande de grâce ne témoignerait pas du contraire.