L’article est publié sur le blog de Bernard Grua sur linkedin.com
Ce deuxième billet fait partie d’une série de réflexions, de la part d’un ancien élève de Sciences Po , sur l’environnement, les conditions et les conséquences de l’annulation d’une conférence de David Satter, auteur notamment de “The Less You Know, The Better You Sleep: Russia’s Road to Terror and Dictatorship under Yeltsin and Putin”. Il fait suite à “La Russie de Poutine, un défi à la science politique”.
Un homme de paix universellement respecté, victime d’un camouflet à l’IEP
- Le Dalai Lama, régulièrement sollicité par les plus grandes universités du monde, devait s’exprimer le 13 septembre 2016 devant 550 étudiants de Sciences Po Paris[1]. Les modalités étaient arrêtées et la conférence avait été annoncée par l’AFP. Sciences Po a décidé de supprimer cette conférence.
- Les explications étonnantes de la Direction de l’Institut, n’ont guère convaincu. L’invocation d’une réunion de substitution devant une assistance, certes prestigieuse mais confidentielle, au collège des Bernardins, laisse supposer une motif réel difficilement communicable.
- Cette annulation fut, de plus, un renoncement quelque peu dévalorisant pour l’école, ses élèves actuels, ses anciens élèves et son corps professoral.
- De son côté, l’Institut National des Langues Orientales (INALCO) a maintenu le rassemblement qu’il avait planifié.
Un témoin clef du premier conflit majeur dans l’Europe XXIeme siècle, persona non grata
- Avant le camouflet au Dalai Lama, Sciences Po avait déjà plié devant un autre pouvoir autoritaire en refusant d’envisager, dans ses locaux, l’intervention d’Arseni Iatseniouk (Le Monde: “Sciences Po annule une conférence sur la Russie de Poutine” [2]).
- Rappelons qu’Arseni Iatseniouk était le premier ministre de l’Ukraine, pays subissant l’occupation militaire puis l’annexion de la Crimée avant une guerre hybride russe dans le Donbass, plaie purulente du continent européen, comme nous le rappelle, ces jours-ci, les tragiques événements d’Avdiyivka [3].
- L’initiative de cette rencontre semble avoir été étouffée avant même qu’elle ne soit rendue publique.
Annulation, en catimini, de la conférence de David Satter
- Le 17 janvier 2017, Anastasia Kirilenko, journaliste russe résidant à Paris, découvre que la programmation de la conférence de David Satter organisée par le CERI pour le 19 janvier a été retirée du site Internet de Sciences Po, bien qu’elle figure encore en “cache” de Google. Elle en fait une sauvegarde. Elle donne de nombreux détail sur cette affaire dans son blog: “Ces think-tanks francais qui se couchent devant le dictateur[4]”.
- Le cache de Google est promptement effacé mais les étudiants de Sciences Po s’enflamment sur les réseaux sociaux, de nombreux professeurs et chercheurs font part de leur mécontentement.
- L’affaire connaît un retentissement national puis international. Buzzfeed[5] ouvre les hostilités le 27 janvier. Le Monde (“Sciences Po annule une conférence sur la Russie de Poutine” op. cit.) et le Figaro[6], le 1er février, rendent compte de cet emballement.
Bernard Grua, Sciences po Ecofi – 1986
Article précédent:
Affaire Satter-Sciences Po, 1ère partie : La Russie de Poutine, un défi à la science politique
Articles à suivre:
Affaire Satter-Sciences Po, 3ème partie : Une justification qui provoque de nouvelles interrogations
Affaire Satter-Sciences Po, 4ème partie : MGIMO -Sciences Po, un partenariat dans le respect mutuel?
Affaire Satter-Sciences Po, 5ème partie : Quelles perspectives?
Notes
[1] L’obs 11/09/2016 – “Le dalaï-lama en France : annulation suspecte d’une conférence à Sciences Po” [2] Le Monde 01/02/2017- “Sciences Po annule une conférence sur la Russie de Poutine” [3] RFI 01/02/2017 – “Ukraine: Avdiyivka sous les bombes, la situation humanitaire s’aggrave” [4] Blog Anastasia Kirilenko 17/01/2017 “Ces think-tanks francais qui se couchent devant le dictateur” [5] Buzzfeed 27/01/2017 – “Sciences Po annule une conférence sur Poutine par peur des représailles de Moscou” [6] Le Figaro 01/02/2017 – “Sciences Po critiquée après l’annulation d’une conférence sur la Russie”