À Kiev, « La vie continue » pour les enfants du Donbass

En mai 2014, après le début des hostilités dans le Donbass, des centaines de milliers de gens ont dû abandonner leurs maisons et partir dans d’autres régions de l’Ukraine pour fuir la guerre. Malheureusement, l’État s’est avéré incapable d’ assurer le soutien économique, social et psychologique d’autant de personnes. Donc, des citoyens ukrainiens ordinaires ont décidé de s’unir afin d’aider ceux dont la vie a été détruite par la guerre.

Les déplacés, qui ont souvent été obligés de quitter leur domicile avec un minimum d’affaires, avaient besoin de tout : vêtements, chaussures, vaisselle, médicaments, poussettes pour les enfants etc.  Ils avaient besoin d’aide afin de remplir les documents indispensables pour trouver un travail et un logement. De nouvelles organisations de bénévoles, telles que « Donbass S.O.S » et « Vostok S.O.S », ont pris en charge ces gens. Mais les déplacés n’avaient pas uniquement besoin d’aide financière. Ils avaient aussi besoin d’aide psychologique et de réhabilitation sociale. À l’époque, ils étaient nombreux à venir à Kiev, à Kharkiv, à Zaporijja, à Odessa, effrayés par les changements soudains survenus  dans leur vie, torturés par un sentiment de culpabilité, par la peur que leurs concitoyens des autres régions de l’Ukraine ne les acceptent pas, par la peur d’être considerés comme des traîtres, des ennemis. Ces gens-là avaient besoin de soutien. Leurs enfants, ayant appris trop tôt le sens du mot « guerre », avaient eux aussi besoin de soutien.

С’est à  ce moment-là , en mai 2014, que  quelques activistes ont décidé de se réunir afin de créer un fonds caritatif « La vie continue ». Le but principal de cette organisation était la réhabilitation pshychologique et sociale des enfants venus de la zone de conflit à Kiev. Irina Popova, directrice de l’organisation, artiste, peintre, ethnologue a compris tout de suite que les enfants du Donbass, venus s’installer à Kiev, avait la possibilté de rêver de connaître mieux la culture populaire ukrainienne,  de prendre conscience de  leur appartenance à la nation ukrainienne. « Si la culture populaire ukrainienne et les traditions ukrainiennes avaient été maintenues dans le Donbass, nous aurions pu éviter cette guerre. Aujourd’hui, notre devoir est d’intégrer ces enfants à la culture ukrainienne, de cultiver en eux l’amour pour leur patrie ».

Дети

Trois mois après la création de l’organisation, elle comptait plus de 800 enfants. Certaines mamans y sont devenues des bénévoles. « Elles sont installées à Kiev depuis quelques mois déjà, elles ont retrouvé leurs repères  et maintenant, elles ont envie d’aider les autres. C’est aussi une sorte de thérapie », affirme Irina. Une des mamans, Svetlana, s’est inscrite dans le club un mois aprés avoir démenagé à Kiev. « Nous sommes arrivés à Kiev au mois de mai et début  juin, nous avons compris que nous étions ici pour longtemps, donc, il fallait organiser des vacances intéressantes pour notre fils. Nous nous sommes inscrits à « La vie continue ». Mon fils n’était jamais resté seul auparavant, donc j’ai demandé à Irina la permission de l’accompagner. Nous étions accueillis chaleureusement, nous nous sentions ici comme chez nous. Avant je n’aimais pas Kiev. Mais j’ai appris à l’aimer grâce à Irina qui m’a présentée cette ville non pas à travers des bâtiments et des rues, mais à travers les gens. Aujourd’hui, j’ai du mal à me rappeler tous les détails mais je me rappelle que je me sentais très bien. Mon fils a pu apprendre beaucoup de choses et a trouvé de nouveaux amis. Les adultes ont aussi eu besoin de communiquer. Toutes les semaines, des rencontres et des  picnics pour tous les membres du club ont été organisés. C’était bien pour les enfants , mais aussi pour les adultes qui avaient besoin de se déténdre et parler ».

Le planning quotidien des petits élèves de « La vie continue » prévoyait les jeux enfantins traditionnels, mais aussi des cours d’art populaire ukrainien. Ainsi, pour Pâques, ils ont appris à peindre des  oeufs, pour Noël, ils ont préparé les plats traditionnels ukrainiens et ils ont fait des crêpes pour  Mardi Gras. Au mois de juillet, tous les membres de l’organisation ont participé au festival ethnique «Le Pays des rêves » à Féofanie. Les plus résistants ont pu rester pour la nuit et fêter avec les habitants de Kiev la vieille fête païenne slave d’Ivan Koupala. Svetlana y a participé : « Je me souviens très bien de ce festival. Pour nous, c’était vraiment une fête car beaucoup de nos villes ont été libéré à ce moment-là : Slovyansk, Gorlovka, Konstantinovka… »

Дети 2

Les enfants acquièrent aussi des connaissances qui leurs seront utiles dans leur vie d’adulte. Ainsi la plus grande banque d’Ukraine « Privat Banque » a organisé des cours de compétence financière pour les enfants et les adolescents. L’Ecole des langues étrangères « Oxford Classe » a donné pour eux des cours d’anglais gratuits.  Comme de nombreuses organisations de bénévoles  en Ukraine, la « Vie continue » ne reçoit aucune aide de l’État et existe seulement grâce à des sponsors privés. Les propriétaires de centres de divertissement pour les enfants, directeurs de musées, organisateurs d’expositions et festivals offrent l’entrée gratuite pour les enfants du club. Les citoyens qui se sentent concernés apportent crayons, jouets. Les bénévoles apprennent aux enfants à faire de la musique, à dessiner, à tricoter etc.

Une des organisatrices de « La vie continue », Evgenia Pirog travaille activement sur un nouveau projet dans le cadre de l’organisation : un atelier de thêatre pour les enfants. « Ce sera un vrai atelier de thêatre, nous allons fabriquer les costumes, les décorations, écrire des scénarios et jouer dans les spectacles.  La première performance a été ” Le Joyeux  Beignet”, écrit par Evgenia et basé sur le célèbre conte de fée du petit bonhomme en pain d’épice. “Le héros de la pièce, Le Beignet joyeux n’a pas eu peur d’aller faire tout seul un long voyage. Sur le chemin, il a rencontré des bêtes sauvages, et ils sont tous devenus amis. Cette pièce  enseigne aux enfants qu’il ne faut pas avoir peur de l’inconnu, qu’il faut toujours rester bon et brave et que c’est la seule façon de réussir “.

Olena Gorkova pour l’Ukraine Crisis Média Center