Le problème du blocus du charbon du Donbass s’aggrave. L’UCMC a déjà écrit sur le blocus énergétique du Donbass, ainsi que sur l’ultimatum des dirigeants des LNR/DNR qui exigeaient d’arrêter le blocus du Donbass avant le 1er mars. Ils exigeaient aussi que les entreprises d’Akhmetov paient des impôts au «budget de la « république »», en cas de refus, ils ont menacé de mettre en place une «gestion extérieure » sur toutes les entreprises sous juridiction ukrainienne qui travaillent encore dans les territoires occupés.
Ce qui se passe. Le blocus des chemins de fer dure depuis plus d’un mois dans 4 directions : le passage à niveau Svitlanove-Chepilove, l’autoroute près de Carbonite dans la région de Lougansk, près de Bachmout et près de Novgorodske sur le chemin de fer qui relie Yasynouvata, contrôlée par les séparatistes et Kostyantynivka ukrainienne dans la région de Donetsk. Le blocus empêche le transport de l’anthracite, nécessaire au fonctionnement des centrales thermiques, ainsi qu’à l’industrie métallurgique.
Qui en souffre? Le blocus pose des problèmes aux autorités ukrainiennes. Les centrales thermiques fonctionnant avec de l’anthracite produisent environ 15% de l’énergie ukrainienne. Ce charbon est aussi utilisé dans l’industrie métallurgique et exporté, ce qui permet à l’Ukraine des recettes en devises et qui affecte par conséquent la stabilité de la hryvnia ukrainienne. Selon les calculs du gouvernement, les pertes de l’État causées par ce blocus peuvent s’élever à 3,5 milliards de dollars par an.
Le blocus cause des dommages encore plus importants à Rinat Akhmetov, oligarque ukrainien, propriétaire de 70% des centrales thermiques fonctionnant avec de l’anthracite acheminée des territoires occupés (étant donné que les Ukrainiens paient pour cela comme pour le charbon importé selon le formule Rotterdam+). Le blocus a un impact négatif aussi sur des entreprises métallurgiques d’Akhmetov qui, selon les estimations de Dragon Capital, perdent entre 5 et 10 millions de dollars tous les mois depuis le début du blocus.
Les LNR/DNR souffrent aussi du blocus, car, en dépit des déclarations officielles affirmant que l’entreprise SKM d’Akkmetov ne paie des impôts que dans le budget ukrainien, Akhmetov a trouvé un moyen de payer aussi les séparatistes pour qu’ils ne touchent pas à ses entreprises. Les employés de ses entreprises touchent leur salaire en Ukraine.
Acheter en Russie : nécessité ou manipulation? Au mois de mars, les autorités ukrainiennes déclarent de plus en plus souvent que si l’Ukraine ne peut plus recevoir du charbon des territoires ukrainiens occupés, elle sera dans l’obligation d’acheter du charbon en Russie. Cette déclaration est soutenue par «Azovstal », entreprise d’Akhmetov qui se trouve à Marioupol : sa direction a entamé des négociations sur l’achat du charbon avec la Russie et les États-Unis. Georgi Touka, ministre adjoint des Territoires occupés, a aussi parlé de la nécessité d’acheter du charbon russe. Finalement, Volodymyr Groysman, Premier ministre ukrainien, a fini par faire une déclaration sur «l’achat forcé» du charbon russe.
Cependant, beaucoup d’experts estiment que derrière des déclarations sur l’absence d’alternative de l’achat de charbon en Russie, le gouvernement ukrainien cache sa volonté politique pour garder le statut quo. Il existe une synergie d’efforts du gouvernement et de Rinat Akhmetov, propriétaire du charbon et des métaux actifs. L’Ukraine a déjà expérimenté l’importation de charbon d’Afrique du Sud en 2014-2015, alors que depuis 2016, la population ukrainienne paie les tarifs publics selon le formule Rotterdam+ (les Ukrainiens ont payé selon cette formule plus de 10 milliards de hryvnias et cet argent aurait dû être utilisé pour ne plus dépendre du charbon en provenance des territoires occupés. Seuls des représentants du gouvernement peuvent répondre sur l’utilisation de cet argent). L’Ukraine pourrait transformer ses centrales thermiques pour ne plus dépendre de l’anthracite. Toutes les déclarations sur l’absence d’alternative à l’achat du charbon en Russie sont une manipulation de l’opinion publique.
«La nationalisation» des entreprises dans les LNR/DNR. Les LNR/DNR ont profité de la situation pour déclencher une guerre contre Akhmetov. Selon l’ultimatum des séparatistes, le blocus aurait dû s’arrêter avant le 1er mars et les entreprises ukrainiennes (y compris celles d’Akhmetov) auraient dû payer des impôts au budget de la DNR. Akhmetov a déclaré officiellement qu’il refusait, donc, le 2 mars 2017, les dirigeants des LNR/DNR ont lancé un processus de nationalisation des entreprises. Environ 40 entreprises ont été «nationalisées» par les séparatistes.
Les experts estiment que l’ordre de «nationaliser » la propriété d’Akhmetov est venu de la Russie. L’Ukraine et la Russie sont des concurrents sur le marché métallurgique, donc la question pour la Russie est de trouver le moment propice pour affaiblir Akhmetov, cela n’était qu’une question de temps. Il s’agit également du passage du modèle de financement des LNR/DNR par la Russie au modèle de l’«autofinancement». De plus, la Russie tirera des avantages de l’instabilité énergétique en Ukraine et la destruction de l’industrie métallurgique ukrainienne. La nationalisation pourrait aussi porter un coup dur à l’économie ukrainienne, à l’industrie métallurgique et à la stabilité de la hryvnia. Elle pourrait aussi être le début de la fin de l’empire d’Akhmetov.