L’année 2017 n’a pas été facile dans l’histoire de l’Ukraine. Le conflit à l’est du pays continue et aucun changement n’est survenu dans la situation avec la Crimée annexée. Certaines réformes à l’intérieur du pays ont avancé, mais la plupart des experts sont persuadés que l’Ukraine n’a pas encore atteint le point de non-retour dans la réalisation des réformes et la réforme anti-corruption, vitale pour le pays, est bloquée. Quels ont été les événements les plus marquants en Ukraine en 2017? Quelles sont les victoires et les défaites principales de l’État ukrainien? L’UCMC vous propose sa vision des choses.
La guerre continue de tuer
L’année 2017 a été l’année des bombardements les plus intenses depuis le début du conflit. Au total, depuis le début de cette année, l’OSCE a constaté environ 400 000 violations du cessez-le-feu, environ 4 000 cas d’armes lourdes stationnées sur des sites interdits par les Accords de Minsk, en dehors des lieux définis pour leur stockage. Suite à des affrontements et des explosions de mines et d’obus, 85 civils ont été tués, dont un membre de l’OSCE, et 384 personnes ont été blessées. Selon les informations de l’état-major de l’Ukraine, l’armée ukrainienne a perdu cette année 191 militaires, y compris ceux qui ont été tués, faits prisonniers et portés disparus, et 174 militaires ont été blessés.
Les États-Unis vont livrer des armes à l’Ukraine
Aujourd’hui, il est clair que les États-Unis vont tout de même fournir à l’Ukraine «des possibilités de défense renforcées». Des armes vont être fournies uniquement pour se battre contre les séparatistes que la Russie soutient à l’est de l’Ukraine. «L’aide des États-Unis est purement défensive par nature, et comme nous le disons toujours, l’Ukraine est un pays souverain et a le droit de se défendre», peut-on lire dans le communiqué du Département d’État des États-Unis. La chaîne américaine ABC News se réfère à plusieurs sources au Département pour annoncer que Donald Trump prévoit d’adopter un plan de livraison à l’Ukraine de 210 lance-missiles antichar portables Javelins et de 35 lanceurs, pour un montant total de 476 millions de dollars. En outre, le Bureau du Président américain a autorisé la livraison de fusils de précision M107A1 et de l’équipement connexe, d’une valeur de 41,5 millions de dollars.
Les sanctions et les négociations sur la mission de paix
Les sanctions des États-Unis et de l’Union européenne. En décembre 2017, les leaders des pays de l’Union Européenne ont adopté la prolongation des sanctions économiques contre la Russie pour encore les six mois à venir. Les sanctions entreront en vigueur le 1er février 2018 et dureront six mois. Il s’agit d’interdictions et de limites imposées sur la coopération avec la Russie dans le domaine des finances, de la défense et de l’énergie. Les États-Unis aussi ont renforcé leurs sanctions contre la Russie.
La mission de paix. Les quatre derniers mois de l’année qui s’en va ont été placés sous le signe des discussions sur la possibilité de l’introduction des forces de paix de l’ONU dans le Donbass. Le 5 septembre, suite à un entretien entre Kurt Volker, diplomate américaine, et Vladislav Sourkov, adjoint de Vladimir Poutine, le président russe a soutenu l’idée de l’introduction des Casques bleus dans la zone du conflit russo-ukrainien à l’est de l’Ukraine. Cependant, il insiste sur le fait que la mission de paix devra être placée uniquement le long de la ligne de démarcation entre le territoire contrôlé par le gouvernement ukrainien et celui contrôlé par les combattants pro-russes. L’Ukraine s’oppose à ce scénario, car elle veut que les Casques bleus soient placés sur tout le territoire du Donbass occupé, y compris sur la frontière russo-ukrainienne. En dépit de tous les efforts de la communauté internationale, un compromis n’a pas été trouvé. Le 27 décembre, Grigoriy Karasine, adjoint du ministre des Affaires Étrangères de la Russie, a déclaré que la Russie ne permettrait pas la présence des Casques bleus sur tout le territoire du Donbass et que la Russie préférait que la mission de paix assure la sécurité des observateurs de l’OSCE.
Le premier échange de prisonniers depuis deux ans
Le 27 décembre 2017, un échange massif d’otages s’est déroulé dans le Donbass, le premier depuis deux ans. C’était un événement très attendu, car de nombreux prisonniers ukrainiens attendaient leur libération depuis des années: certains ont été capturés en 2014, d’autres en 2015, comme quelques «cyborgs» de l’aéroport de Donetsk.
Tout d’abord, les parties avaient conclu un accord pour un échange selon la formule 74 pour 306. Cependant seuls 73 Ukrainiens sont rentrés chez eux et la partie ukrainienne n’a remis aux séparatistes que 233 personnes. Cette différence s’explique par le refus de certains prisonniers de participer à l’échange: une femme n’a pas voulu revenir en Ukraine et plusieurs personnes originaires des territoires temporairement occupés ont refusé d’y retourner.L’échange a eu lieu près de Horlivka occupée dans la région de Donetsk, sur le point de contrôle de «Mayorske».
Les combattants pro-russes ont rendus 54 prisonniers militaires ukrainiens qui se trouvaient dans les prisons de la DNR et 5 prisonniers militaires qui étaient captifs de la LNR, ainsi que 14 civils. Selon les données du Service de sécurité de l’Ukraine, 103 Ukrainiens se trouvent toujours dans les prisons des séparatistes.
Les réformes en Ukraine vues par la société et les experts
La réalisation des réformes en Ukraine n’est pas aussi rapide qu’on l’espérait. Malgré certaines réalisations, plusieurs objectifs fixés pour cette année n’ont pas été atteints. Ceci est reconnu par la communauté internationale, les experts ukrainiens et la société civile. Selon un sondage, réalisé par le Fonds «Initiatives démocratiques» Ilko Koutcheriv, 41% des Ukrainiens estiment qu’aucune réforme n’a été réalisée, surtout par la faute des bureaucrates et des fonctionnaires. La réforme anti-corruption est considérée comme la plus importante pour le pays, cependant seul 1% des sondés trouvent que la lutte contre la corruption progresse bien, contrairement à 86% pour lesquels cette réforme n’a apporté aucun résultat.
Les experts de Chatham House estiment aussi que la corruption est le plus grand problème du pays et l’ont souligné dans leur rapport «The Struggle for Ukraine», où ils décrivent les réalisations de l’Ukraine depuis la Révolution de la Dignité et les domaines dans lesquels le pouvoir continue de décevoir les Ukrainiens. Selon les experts, parmi les réussites de l’Ukraine figurent les changements intervenus dans le gouvernement et le système juridique, plusieurs changements constitutionnels et le démarrage de plusieurs réformes. Parmi les progrès importants figurent aussi l’arrivée de nouveaux politiciens dans le gouvernement, la réforme de la gestion de l’État et les concours ouverts pour les candidats aux postes dans les institutions d’État, les tribunaux et les institutions anti-corruption.
L’absence de justice
Cependant, le système judiciaire n’a pas été vraiment réformé et, en 2017, les Ukrainiens l’ont bien ressenti. Les verdicts contre les accusés de crimes commis à l’époque du Maidan ne sont pas très rassurants. Après trois ans de procès, la Cour du district de Chevtchenko à Kyiv a condamné à quatre ans de prison avec sursis Yuriy Krysine, le chef d’un groupe de voyous, impliqué dans le meurtre de Vyatcheslav Veremiy, un journaliste de l’édition «Vesti». Il a été assassiné à Kyiv, près de la place St-Michel, dans la nuit du 18 au 19 février 2014.
Ce n’est ni le premier, ni le dernier cas d’impunité et d’absence de justice dans les affaires du Maidan. Au total, 3 000 poursuites pénales ont été engagées, 110 accusés sont recherchés par la police, mais il n’y a qu’une seule personne qui a été condamnée. La veille du 4e anniversaire des événements de la place Maidan, il est devenu clair que l’enquête sur les crimes commis contre les participants au Maidan n’a jamais été une priorité de l’État.
Le régime sans visa avec l’Union européenne
Selon un sondage réalisé par le Fonds « Initiatives démocratiques Ilko Koutcheriv», l’événement le plus marquant de 2017 reste la mise en place du régime sans visa pour l’Ukraine, en tout cas, pour 26% des Ukrainiens. Pour 83% des Ukrainiens, il s’agit d’un événement positif.
Au cours des trois premiers mois du régime sans visa, du 11 juin au 11 septembre, 5 799 360 Ukrainiens, soit 14,5% de la population ukrainienne, ont voyagé dans l’UE. Le nombre total de personnes parties en Europe avec leur passeport biométrique est de 1 413 178 Ukrainiens, 235 795 (0,6%) ont profité du régime sans visa. Donc, au début, même ceux qui avaient ces passeports, avaient également des visas. Au total, depuis la cessation du régime des visas, 355 000 Ukrainiens en ont profité.
Le cinéma ukrainien en 2017: le début d’une industrie
En avril 2017, la loi «Sur le soutien de l’État au cinématographe en Ukraine» réglant les conditions pour une production collective et pour la lutte contre le téléchargement illégal, est entrée en vigueur. Le budget d’État 2018 prévoit plus d’un milliard de hryvnias (30 millions d’euros) pour le développement du cinéma ukrainien, soit deux fois plus qu’en 2017. En automne, la Rada Suprême a adopté deux projets de loi dont l’un supprime la TVA pour les producteurs de films ukrainiens jusqu’en 2023 et l’autre supprime les taxes douanières sur l’équipement pour les tournages importés.
Les résultats ne se sont pas fait attendre. En 2017, plus de 30 films ukrainiens sont sortis au cinéma: des drames militaires, des films fantastiques, des comédies et des films historiques. Les films qui ont rassemblé le plus de spectateurs sont: «Le rouge» de Zazi Bouadze, «DZIDZIO Contrabass» d’Oleg Borchtcevskiy, «Cyborgs» d’Akhtem Seytablaev. Il est intéressant de noter que certains pays ont nominé aux Oscars leurs films réalisés en coopération avec l’Ukraine. Il s’agit de «Frost» de Sharunas Bartas (Lituanie), «The Line» de Peter Bebjak de Slovaquie. Grâce au nouveau système de soutien de l’État ukrainien, les réalisateurs ukrainiens débutants ont aussi pu tourner des films: «Falling» de Maryna Stepanska, «Pause technique» de Philippe Sotnitchenko et «Swings» de Valeria Sotchyvets.
«Cyborgs» d’Akhtem Seytablaev
Les exploits sportifs en 2017
Selon le portail de boxe Fightnews.com, Vassyl Lomachenko, sportif ukrainien, champion du monde des super-plumes de la WBO, a été reconnu meilleur boxeur 2017 et il est deuxième dans le classement des meilleurs boxeurs du monde de ESPN.
Anna Mouzytchouk est devenue championne du monde, tournoi féminin, de parties rapides en 2016 et championne du monde, tournoi féminin, de blitz par deux fois, en 2014 et 2016. Cependant, elle est sur le point de perdre ses titres en raison de son refus de participer au Championnat du monde en Arabie Saoudite. Anna juge inacceptable la discrimination des femmes dans ce pays. «Je vais perdre deux titres de championne du monde l’un après l’autre. C’est juste parce que j’ai décidé de ne pas aller en Arabie Saoudite. Ne pas jouer selon les règles de quelqu’un, ne pas porter un abaya, ne pas être obligée de marcher dans la rue accompagnée et ne pas se sentir un être de seconde classe», a-t-elle écrit sur sa page Facebook.
Heureux, malgré tout….
Malgré tout, les Ukrainiens sont heureux…. Tel est le résultat du sondage réalisé par le Fonds «Initiatives démocratiques» Ilko Koutcheriv. Les Ukrainiens heureux vivent surtout dans les régions de l’ouest (68%), du centre (57%), du sud (51%) et de l’est (55%). La seule région où la plupart des habitants sont malheureux est le Donbass: 64% contre 27% de gens se sentant heureux. Cependant, les habitants de toutes les régions espèrent à l’unanimité que l’année prochaine sera meilleure que celle-ci.