Le 1 septembre 2016, les représentants de la République autoproclamée de Donetsk (DNR) feront une déclaration sur l’ouverture du «Centre représentatif de la République populaire de Donetsk» en Tchéquie.
À Donetsk, on considère ce Centre comme la première représentation officielle de la DNR à l’étranger.
Qui a fondé ce Centre et quels diplomates tchèques y sont impliqués? La DNR pourrait-elle réussir le lancement de son travail «diplomatique» dans un pays européen ? Quels seront les conséquences de cette décision ? Les journalistes d’ «Evropeyska pravda» ont mené une enquête pour trouver une réponse à ces questions.
L’UCMC publie une version courte de leur article.
Le «consul» fictif
L’information sur la «victoire diplomatique de la jeune République» a été publiée à la fin de la semaine dernière sur le site dnr-news.
«Le 1 septembre 2016, le Centre représentatif de la République de Donetsk ouvrira ses portes à Ostrava dans la République tchèque. Le Centre représentatif de la DNR est la première représentation officiellement enregistrée de notre République officiellement enregistrée* dans les pays de l’Union Européenne».
Le nom du «consul» des séparatistes n’est pas précisé dans ce communiqué. On y trouve toutefois sa photo. Il s’agit de Nela Lisková, citoyenne tchèque qui habite à Ostrava.
Sur Internet, ses photos la montrent à Donetsk. On l’aperçoit aussi pendant des rencontres avec des chefs séparatistes. Nela a confirmé l’information sur sa page Facebook, ainsi que sur le site Internet de l’organisation tchèque «Milice populaire» : elle sera bel et bien le consul/ de la DNR en Tchéquie c’est elle qui sera le «consul» de la DNR.
«Madame Lisková est membre du conseil de la Milice populaire tchèque, un groupe paramilitaire, lié au parti d’extrême-droite Démocratie nationale lui-même directement lié à la Russie», explique Jakub Janda, représentant du Centre des études «Valeurs européennes». Le rapport du ministère des Affaires Étrangères tchèque confirme l’avis des autorités tchèques sur la radicalité de ce groupe.
Selon Ondra Sokup, journaliste tchèque, «Ils sont quelques centaines des personnes à travers tout le pays, Un mélange classique de la théorie du complot, d’anti-américanisme et de la vision pro-russe qui en découle. Ce mouvement surfe sur la vague anti-islamique, il a commencé à essaimer dans toute la République tchèque. Mais une enquête récente de notre journal a constaté qu’ils recrutent à peine quelques centaines des personnes, une fois par mois».
La réaction du ministère des Affaires étrangère de la République Tchèque
Lundi 29 août dernier, le ministère des Affaires étrangère de la République Tchèque a publié un démenti officiel concernant autour du «consul» et de toute autre forme de «mission diplomatique de la DNR». «La République auto-proclamée de Donetsk ne peut pas avoir une mission diplomatique accréditée en République tchèque, car la République tchèque ne reconnaît pas son existence, donc ne peut pas entériner leurs représentants diplomatiques».
Une mission diplomatique fictive
Il faut toutefois espérer qu’il n’y aura pas d’incident le 1er septembre. Les partisans des séparatistes de Donetsk ont prévu une présentation de cette mission à Ostrava, où le centre est d’ores et déjà enregistré.
On trouve sur le site du ministère de la Justice tchèque une information de taille sur l’organisation «Zastupitelské centrum DNR» («Centre représentatif de la République populaire de Donetsk» en français). Ce centre a été enregistré en juin 2016, son objectif est de promouvoir le «développement de la coopération entre la Tchéquie et la DNR dans les domaines de l’économie, du commerce et de la culture». Ce «consulat» a été fondé par trois citoyens tchèques : Nela Lisková, Petr Viktorýn, et Radim Hrubeš, tous trois originaires de Tchéquie.
L’adresse du Centre est notée dans les statuts et dans le registre public du ministère de la Justice tchèque.
C’est ici, à la périphérie d’Ostrava, dans un bâtiment délabrés aux murs hâtivement peints, que l’organisation visant à «représenter les intérêts de la DNR» est enregistrée.
Mais, bien entendu, les journalistes n’y seront pas invités ce jeudi. La présentation du «Centre» aura lieu à hôtel «Mercure» situé au centre-ville.
Les conséquences politiques
L’événement du 1 septembre pourrait aller beaucoup plus loin qu’un simple rassemblement d’illuminés.
Les organisateurs de cet événement ont énormément travaillé à inviter le maximum de membres de l’élite politique. On trouve même parmi les invités les adversaires de ce spectacle organisé par les partisans des séparatistes. À titre d’exemple : Marek Janicek, député du parlement tchèque et un des plus proches collaborateurs de Karel Schwarzenberg.
L’élite politique tchèque compte plusieurs politiciens pro-russes, y compris Miloš Zeman, le président tchèque, alors que le Parti communiste représente la troisième force de la Chambre des députés du Parlement tchèque. Et il y a de grandes chances que ce meeting du «consulat de la DNR» ait lieu en présence d’hommes politiques très influents sur le plan national.
Plus encore, les «autorités de la DNR» sont aussi censées participer à l’événement du 1 septembre. L’invitation aux députés du Parlement, qui évoque cette présence, ne précise toutefois aucun nom.
Il n’y a aucune assurance que la Prague officielle pourrait empêcher à ces personnes de participer dans la présentation et que les autorités tchèques aient l’intention d’arrêter ces personnes s’ils les trouvent.
«Si ces personnes ne violent pas la loi tchèque, les autorités ne peuvent rien faire. Bien entendu, si un criminel se rend à cet événement, le gouvernement tchèque peut l’arrêter et de le donner l’Ukraine en vertu de l’extradition, mais en titre général, ce soi-disant consulat est une organisation civile légitime», explique Jakub Janda
Toujours d’après la journaliste tchèque Ondra Soukup, «La République tchèque pourrait se contenter de ne pas délivrer les visas à ceux qui ont l’intention de venir, ou arrêter les personnes recherchées. Mais s’il s’agit d’une poète de Horlivka qui vient pour parler des atrocités commis par le junte de Kiev, elle en a le droit».
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Cette histoire montre que la DNR profite de l’ouverture des démocraties européennes pour créer des missions diplomatiques fictives au sein de l’Union Européenne. Dans les conditions d’une guerre hybride, destinée à diviser l’Europe, la simple création des organisations civiques qui prétendent être des structures officielles suffit, car les forces pro-russes en Europe soutiendront la mise en place de ces centres. Ce n’est qu’une question de temps avant que de tels «consulats» soient créés à Paris, Berlin, ou Madrid.
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photo: facebook, eurointegration.com.ua
